SAINT ETIENNE HARDING
Etienne, surnommé Harding, est né en Angleterre de parents nobles et riches. Il fut élevé dans le monastère de Shelburne au comté de Dorset. Il y fut instruit dans les sciences profanes et dans la religion. Il sut de bonheur réprimer ses passions et conserver dans son âme un calme inaltérable. Ainsi son visage avait l’air toujours serein.
Le désir de toujours progresser lui fit quitter le monastère pour se rendre en Ecosse, à Paris puis à Rome. Durant ses longs voyages, lui et ses compagnons récitaient journellement les psaumes.
De retour de Rome, il entendit parler du monastère de Molesme (entre Troyes et Monbard) qui venait d’être fondé par Saint Robert. Il résolut de s’y rendre. Les religieux de ce monastère étaient très pauvres et ne se nourrissaient souvent que de légumes ; mais, devant leur sainteté, les habitants des environs leur fournissaient souvent à manger. Cependant l’abondance de nourriture engendra la dissipation et la violation de plusieurs préceptes de l’évangile. Le mal devint si grand que Saint Robert, incapable de venir à bout des dérèglements, quitta le monastère. Le Bienheureux Albéric prieur, et Etienne le suivirent peu de temps après ; mais Robert et Albéric reçurent l’ordre du pape de retourner au monastère. Malgré leur parole de rentrer dans le droit chemin, les moines continuèrent leurs dérèglements et Etienne, qui était alors leur supérieur, ne parvint pas à remettre de l’ordre.
Après avoir élu un abbé, Saint Robert quitta de nouveau le monastère avec Albéric, Etienne, et dix-huit autres religieux après en avoir obtenu la permission d’Hugues, archevêque de Lyon, et du légat du Saint-Siège. Ils se retirèrent à Cîteaux dans un désert marécageux à vingt kilomètres de Dijon. Ce désert leur fut donné par Eudes, duc de Bourgogne, où Etienne fit bâtir une petite église dédiée à la Sainte Vierge, comme toutes les églises de l’Ordre le furent par la suite. Après avoir abattu de nombreux arbres pour construire leurs cellules, le monastère achevé, ces vingt-et-un moines firent le 21 mars 1098 une profession de la Règle de Saint Benoît. C’est de ce jour que date la fondation de Cîteaux.
Un an après, Robert fut obligé de retourner à Molesme et Albéric fut élu à sa place. Le monastère était confit en dévotion. Ceci est confirmé par la venue de deux légats du pape Paschal II qui visitèrent l’abbaye.
Le Bienheureux Albéric obtint du pape Paschal II en 1100 la confirmation de son Ordre et en dressa les statuts qui devaient être conformes à la règle de Saint Benoît. Eudes venait souvent à l’abbaye pour prier et se fit même construire un château à proximité. Il voulut être enterré dans l’église de l’abbaye ; plusieurs de ses successeurs y choisirent aussi leur sépulture. Henri, fils puiné du duc Eudes, se fit moine et resta dans cet état jusqu’à sa mort1.
Après le mort du Bienheureux Albéric (1109), Etienne fut choisi pour lui succéder comme abbé. Il veilla au maintien de la Règle et limita la visite des étrangers qui perturbaient les moines. Seul le duc de Bourgogne avait le droit de renter dans le monastère et cela sans sa cour. On supprima dans l’abbatiale les croix et ornementations en or et argent par des objets en bois. Il n’y aurait plus qu’un chandelier en fer. Même les calices ne furent plus qu’en argent doré. Les vêtements des offices ne devaient comporter ni soie, ni or, ni argent ; mais si l’abbatiale n’avait rien de riche, elle était d’une propreté méticuleuse qui annonçait la grandeur du maître qui y était servi. Des religieux de Cluny, dont l’abbatiale était pourvue de riches ornements, furent choqués de la pauvreté de celle de Cîteaux, mais Saint Bernard, dans un ouvrage que nous avons encore, justifia cette pauvreté (Apol. C. II, n. 31).
Les moines de Cîteaux travaillaient de leurs mains et étaient copistes. C’est à cette époque que Saint Etienne fit faire une copie de la Bible pour l’usage de son abbaye. Pour la rendre exacte, il se servit d’un grand nombre de manuscrits. Il consulta les Juifs qui lui expliquèrent le texte hébreu, ce qui lui permit de corriger le sens originel là où il avait été déformé2.
Le duc de Bourgogne, vexé de ne plus pouvoir tenir sa cour dans l’abbay,e retira sa protection et cessa de fournir des aides matérielles. Leur travail ne suffisant pas à leur survie, les moines vécurent bientôt dans une extrême pauvreté. Etienne sortit alors du monastère pour mendier, tout en refusant les aumônes des prêtres simoniaques.
A cette épreuve se joignit la maladie en 1111 et 1112 qui entraîna la mort de la majorité des moines de Cîteaux. Saint Etienne attribuait ces calamités à la rigueur excessive de la Règle et se mit à prier pour la sauvegarde de son petit troupeau. Il fut bientôt exaucé. Alors que plus personne ne venait faire profession, il se présenta un jour trente et une personnes au nombre desquelles était Saint Bernard. Il en vint encore d’autres et Cîteaux fut ainsi sauvée. Saint Etienne fut même en mesure de fonder d’autres abbayes telles que celles de la Ferté (1113) au diocèse de Châlons, de Pontigni (1114) près d’Auxerre, de Clairvaux et de Morimond (1115) au diocèse de Langres.
Le cardinal Guy, archevêque de Vienne en Dauphiné et légat du Saint Siège, fit un voyage à Cîteaux en 1117. Edifié par la conduite des moines, il demanda à Etienne de fonder un monastère à Bonnevaux dans son diocèse. Ce prélat, qui fut par la suite pape sous le nom de Calixte II, mourut en 1124. Il voulut que l’on portât son cœur à Cîteaux et qu’on le remît dans les mains du saint abbé. Il est enfermé dans une châsse derrière le maître autel.
D’autres grands événements eurent lieu à Cîteaux. L’histoire de cette abbaye du vivant de Saint Etienne est encore riche de prodiges, mais nous arrêtons notre récit ne voulant pas en faire un livre !
Saint Etienne mourut le 28 mars 1134. Il fut enterré dans le cloître près de la porte de l’abbatiale dans le tombeau de son prédécesseur le Bienheureux Albéric. Plusieurs autres abbés sont enterrés à Cîteaux ainsi que des ducs de Bourgogne. Les Cisterciens l’honorent le 15 juillet. Sa fête est de première classe avec octave car il est considéré comme le fondateur de l’Ordre. Le martyrologe Romain le fête le 17 avril jour supposé de sa canonisation (Voir Benoît XIV, de Can.).
On n’est plus étonné maintenant de la rapidité avec laquelle s’est répandu l’Ordre de Cîteaux. Ora et labora.
1. Robert, premier duc de Bourgogne, était le fils de Robert roi de France et frère d’Henri Ier aussi roi de France. Il eut quatre fils, Simon, Hugues, Henri et Robert. Henri qui seul soutint sa race et qui mourut avant son père, laissa cinq enfants, Hugues, Eudes, Robert, Henri et une fille nommée Béatrix. Après trois ans de principauté, Hughes se fit religieux à Cluny et laissa ses états à son frère Eudes, le fondateur de Cîteaux. Ce prince étant allé au secours des Chrétiens au Levant mourut à Tharse de Cilicie en 1102. Son corps fut rapporté à Cîteaux, selon les ordres qu’il avait donnés. Eudes eut deux fils, Hugues surnommé le Pacifique, qui lui succéda dans sa principauté et Henri qui se fit religieux à Cîteaux sous le Bienheureux Albéric comme nous venons de le dire.
2. L’exemplaire manuscrit de la Bible, copié sous saint Etienne en 1109, se garde encore à Cîteaux. Il est en quatre volumes in-fol.
SAINT SIMEON
Evêque de Séleucie et de Ctesiphon et ses compagnons martyrs en 341