Une malheureuse religieuse commet des actes délictueux au couvent des dominicaines d'Albe (Italie). Sous des dehors de vertu, vanité et amour-propre guident ses pas.
Marguerite de Savoie, alors prieure de la communauté, n'est pas dupe : à force de donner le change, la malheureuse se fatiguera. En attendant, elle redouble de prière en sa faveur, tout en multipliant remontrances et mises en garde fraternelles.
La sœur meurt subitement. Dans le couvent, une discussion naît au sujet de son destin post mortem. Les échanges tournent à la querelle. Marguerite invite ses sœurs à garder le silence jusqu'au lendemain matin.
Parvenue dans sa cellule, la bienheureuse a du mal à s'endormir. Ces tensions entre les sœurs l'inquiètent.
Au bout d'une heure, elle sent une présence dans l'obscurité. Elle allume une chandelle à la hâte et découvre, à un mètre d'elle, la sœur défunte. « Je suis, dit-elle, une de ces vierges folles qui ont négligé de mettre de l'huile dans leurs lampes ; j'ai entendu retentir à mes oreilles le Je ne vous connais pas, et la porte du paradis m'a été fermée. Mon sort est celui des damnés dans le lieu d'horreur, de désespoir, de grincements de dents. »
Marguerite est terrorisée. Elle balbutie : « Mais vos œuvres, où sont-elles ? - Mes œuvres ! je les ai faites par vanité et pure hypocrisie. » Et, prenant une poignée de paille sur le sol, elle la jette en l'air en prononçant ces mots : « Voilà, l'image de la vie des âmes orgueilleuses : un peu de paille que le moindre souffle emporte et fait disparaître pour toujours ! »
Puis la vision disparaît. Glacée d'effroi, Marguerite s'agenouille près de son crucifix et se met à prier comme jamais. Le lendemain, elle fait part aux sœurs de sa vision nocturne et demande que chacune prie du mieux possible pour le salut de l'âme de la défunte.
Le succès de ses prières est entier : la religieuse, torturée de remords, n'est plus jamais apparue à qui que ce soit.
Marguerite a été béatifiée en 1761.