Un jour de 1310, les moines de l'abbaye bénédictine de Georgenberg-Fiecht (Autriche, Tyrol, aujourd'hui commune de Vomp, vallée de l'Inn), célèbrent une messe d'une ferveur extraordinaire, en présence de dizaines de fidèles venus des alentours.
Après la consécration du vin, le prêtre célébrant est terrassé intérieurement : « Jésus est-il vraiment présent sur l'autel ? Est-il possible que son corps et son sang soient cachés sous les espèces du pain et du vin comme on nous l'a appris ? » s'interroge-t-il ? « Et si tout ceci n'était que des balivernes ? »
A peine a-t-il fini de ruminer ainsi que son visage se couvre de sueur et ses jambes se mettent à trembler. Il ne parvient pas à détacher son regard du calice : le vin de messe s'est transformé en un liquide rougeâtre ayant tout l'aspect du sang frais !
Une seconde plus tard, le contenu du calice commence littéralement à bouillonner. Le prêtre, décontenancé, entend les voix des fidèles assis non loin du cœur car tous se sont aperçus que quelque chose ne va pas. Il décide de consommer l'intégralité du calice afin que personne, pas même les autres moines, puisse constater le phénomène.
Mais le contenu a déjà débordé du calice. Le prêtre en absorbe une bonne partie et verse le reste dans un récipient se trouvant à côté du linge avec lequel on essuie ordinairement le calice après la communion eucharistique. Et, sans plus attendre, il dépose le récipient précieux dans le tabernacle du maître-autel.
L'abbé, dubitatif, donne l'ordre au célébrant de lui montrer le calice qu'il a enfermé sans son ordre et de lui expliquer la raison pour laquelle la célébration est ainsi perturbée. Puis il invite les autres religieux à observer à leur tour le saint calice. Constatant que toute la communauté est à présent groupée autour du tabernacle, les fidèles assis dans les premiers rangs, les rejoignent à leur tour et rendent grâce à Dieu pour ce prodige.
Le célébrant ne douta jamais plus.
Rapidement, l'abbaye de Fiecht devient un lieu de pèlerinage régional. Peu à peu, des pèlerins venus de toute l'Autriche et même d'au-delà se recueillent devant la relique eucharistique. L'élite sociale et religieuse de l'époque, dont nombre d'évêques, défile devant le tabernacle. Les autorités ecclésiastiques encouragent et accompagnent ce sanctuaire.
En 1472, l'évêque de Brixen envoie sur place le père Johannes Losch, et deux autres prêtres, les pères Sigmund Thaur et Kaspar de Absam, pour mener une enquête très serrée sur le miracle.
Huit ans plus tard, tous constatent un fait incroyable : le sang recueilli est encore frais « comme s'il venait de sortir d'une blessure ».
Dans les dernières années du XVIe siècle les idées de Martin Luther commencent à gagner du terrain dans le Tyrol.
Les prédicateurs catholiques font référence au miracle de Fiecht et obtiennent maintes conversions à la foi de l’Église.
Aujourd'hui, le sang Miraculeux, à présent coagulé, est conservé dans un bel ostensoir réalisé en 1719, lui-même déposé dans l'église baroque de Fiecht, depuis sa construction en 1735.