8h15 : le réveil sonne. Debout tout le monde, aujourd'hui est un grand
jour pour nous ! Michel saute de son lit comme un diable hors de sa
boîte, et sa joie fait plaisir. Lui qui a tant de mal à sortir de son
lit d'habitude.
Tout le monde s'habille en "sale" ,"traversée de la mer" comme disent les
garçons, oblige.
Je mets leurs vêtements du dimanche aux deux petits qui, eux, ne devraient pas
trop se salir dans les portes- bébé.
Le petit déjeuner est vite enfilé par tous ces enfants (et même grands)
impatients de l'aventure qui les attend.
Derniers préparatifs, transvaser le pique nique du frigo dans un sac,
vérifier que les vêtements du dimanche sont tous bien prêts, prendre les
cirés... et surtout, l'appareil photo sans lequel le bonheur de Joël ne
serait pas complet. Je dois reconnaître que nous avons eu de très bons
clichés.
En route. Le trajet nous semble interminablement long. L'autoroute est
bien monotone !
Nous approchons, chacun cherche à voir le Mont St Michel et le guette de
toute son attention. "Ça y est, je l'ai vu !" lance une voix. Laquelle ?
Mystère... je veux croire que c'est celle de Mic.
Le Bec d'Andenne. C'est là que nous devons retrouver le reste du
pèlerinage et mes parents , en Normandie depuis la veille, eux.
Les retrouvailles sont chaleureuses. Maman est toujours si fière
d'embrasser ses petits enfants et de se montrer en leur compagnie.
Pique nique tous ensemble. Mes sandwich en pain de mie font petite
figure en face des tartelettes et autres cakes au fromage de Maman. Les
enfants se ruent sur la cuisine de leur Grand Maman qui avait bien prévu
cela!
Hop hop, l'heure tourne et il va falloir partir. Chacun enfourne un
dernier beignet, ou une mousse au chocolat selon les goûts. Je cours
avec Joël jusqu'au minibus troquer le sac du pique nique contre le sac
de vêtements et les porte bébés. Je donne les papiers à Papa, puisqu'il
est entendu que c'est lui qui emmène le minibus sur le parking du Mont
d'où nous repartirons tous puisqu'il contient juste le nombre de places.
Quel est ce seau et ces bottes que papa dépose dans le coffre ? Papa
m'avoue avec un sourire de coquin qu'il va aller à la pêche pendant que
nous pélerinerons! Son vieux démon le reprend... (il reviendra
bredouille, mais ravi d'avoir rempli ses bottes dans la vase !)
Retour sur le point de départ. Un dernier mot du frère chanoine dont
j'ignore encore le nom, les recommandations du guide qui nous prévient
qu'il y aura des rivières assez hautes à traverser, des endroits peu
sûrs et de la vase glissante. Il vient ensuite vers nous pour nous
prévenir que Solène aura du mal à certains endroits et qu'il faudra la
porter. Le regard de Joël croise le mien. Nous la gardons tout de même
avec nous, elle serait trop déçue de ne pas venir. Tant pis pour le
surcroit de fatigue, nous la porterons s'il faut !
Départ !!!
En effet les début sont assez glissants et je dois me concentrer pour ne
pas tomber. Honorine est dans l'écharpe devant, le sac de vêtements dans
mon dos et j'ai un garçon pendu à chaque main. Si je tombe, ce sera beau !
Puis du sable. C'est assez fatigant. Le sac à dos me scie les épaules,
et autrefois bonne marcheuse, je me rends compte que j'ai bien perdu en
entrainement. Mais le paysage sauvage est superbe. La Tombelaine à
droite et le Mont en face se découpent de cette terre nue que l'eau fait
briller au soleil. C'est grandiose !
Les chants succèdent aux dizaines de chapelet. Nous traversons une
rivière. Facile, elle est peu profonde.
Peu à peu, nous arrivons à la hauteur de la Tombelaine. "La tombe
d'Hélène": je repense à cette Hélène morte ici en voulant rejoindre son
chevalier parti avec Guillaume le Conquérant pour l'Angleterre. Pauvre
Hélène ! et pourtant c'est si beau de mourir dans un si bel endroit...je
comprends que son fantôme hante et égare qui traversent la baie un soir
de pleine lune.
Mais gare à la rêverie, une grosse rivière est là devant nous. L'eau
monte peu à peu. Il y a du courant. Joël porte Solène en plus de
Cyprien. Un jeune homme me propose de porter Alexis qui commence à
perdre pied. J'accepte avec reconnaissance. Puis le niveau baisse. Joël
remet Solène par terre et prend quelques photos.C'était trop tôt pour
poser la petite et je suis obligée de la porter à mon tour
Nous sortons de la rivière et la marche reprend son rythme. Pas pour
longtemps : des sables mouvants nous obligent à contourner le Mont. Le
grand Archange veut nous voir patauger encore un peu. Nous marchons sur
des salicornes. Elles foisonnent et je dois interdire à Maman d'en faire
goûter aux enfants. L'endroit ne me paraît pas assez sûr.
Enfin nous arrivons. Pieds nus, les pieds boueux, ravis.
Papa nous attend. Il est bien élégant avec son costume ! le contraste
est amusant !
Nous cherchons un endroit pour nous laver les pieds. C'est difficile :
il n'y a qu'un seul robinet de disponible pour tout le monde et le temps
presse. Il nous faut nous changer et emmener Michel se confesser avant
la messe.
Joël trouve un petit coin pour nous changer. L'endroit est venteux et
sale. C'est un peu la panique. Honorine hurle...
Enfin nous voilà habillés.
Papa part en tête avec Michel, suivi des autres.Je reste en arrière pour
tenter de calmer Honorine, mais c'est peine perdue, et je pars avec un
bébé hurlant dans l'écharpe. J'aime me faire remarquer! Heureusement,
elle se calme pendant que je marche . Je bouscule un peu les touristes
nonchalants et arrive enfin à l'église.
Surprise : je pensais trouver tout mon monde devant , et Joël et les
enfants sont tout au fond avec Maman. Joël me chuchote que Papa est avec
Michel un peu plus loin. Petite déception : j'aurais aimé faire suivre
sa messe à Michel. Au lieu de cela, mon pauvre bonhomme est tout seul
sur un banc devant... J'envoie une escouade d'anges gardiens, et je
demande à la Ste Vierge d'aider mon gamin à recevoir son Fils. La
liturgie est belle, le sermon de ceux que l'on serre toute sa vie contre
son âme...
Agnus Dei : Joël me chuchote à l'oreille pour me demander si c'est
faisable de prendre des photos. Oui, si c'est discret et sans flash...
Communion : C'est Papa qui conduit son petit fils à la Sainte Table...
Je prie de toutes mes forces pour mon tout petit, déjà si grand que son
âme m'échappe un peu plus. Nouvel enfantement, désormais il a une
intimité avec Dieu.
Nous partons communier à notre tour. Détachement, ai je écrit? Oui, mais
nous nous retrouvons tous unis en Dieu. C'est mieux encore.
Action de grâce: Michel me rejoint au fond de l'église : Maman, j'étais
trop loin de vous... Je guide un peu sa prière, lui rappelle des
intentions qui nous sont chères.
Ite missa est, bénédiction.
La messe est finie.
Joël part à la sacristie faire remplir le livret de famille chrétienne
et donner des images.
Michel choisit une image pour chacun de ses grands parents...
Il est temps de quitter ce lieu avant la marée.
La soirée se poursuivra dans un petit restaurant avant que nous ne
quittions mes parents.
Michel montrera une vraie surprise et une émotion devant les cadeaux des
uns et des autres : il ne s'y attendait pas.
Retour paisible à la maison.La fête recommencera à chaque messe, et l'an
prochain, nous retournerons au Mont Saint Michel, Michel l'a réclamé à
son papa, et cela ne se refuse pas!
La mère débordée
Merci chère Parvula de ce très beau récit de la communion de Michel .
Je vous imagine très bien en écrivain pour les Veillées des Chaumières !
Mirabelle
Ps: Le texte n'est pas bien cadré, car j'ai agrandi l'écriture !